Menuiseries – Escaliers – Agencements – Cuisines
LOMBARDIE – 87220 EYJEAUX
Monsieur Frédéric BOUTET
ENERGIES DIFFUSIONS
Le Village
31290 MONTCLAR LAURAGAIS
Eyjeaux, le 17 février 2009
Pour information :
Monsieur le Procureur de la République près le TGI Toulouse
Monsieur le Premier Président de la Cour d’appel Toulouse
Monsieur le Président du TGI Toulouse
Monsieur le Juge de proximité Toulouse
Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de Toulouse
Monsieur le Ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité, Brice HORTEFEUX
Monsieur le Ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, Eric WOERTH
Monsieur le Ministre auprès du Premier Ministre, en charge de la mise en œuvre du plan de relance, Patrick DEVEDJIAN
Messieurs les Sénateurs Jean ARTHUIS, Jean-Léonce DUPONT, Philippe MARINI
Monsieur le Président de l’ADEPACCOPAB, (Association de Défense des Entreprises Pénalisées par l’Adhésion obligatoire à une Caisse de Congés Payés du Bâtiment) Pascal SANCHEZ
Madame Elisabeth BEILLES, Présidente de la Caisse de Congés Payés de la Région de Toulouse – R.A.R.
Objet : Les décrets D.3141-12 à 37 du Code du travail contreviennent à la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (Convention EDH).
Cher Collègue,
Bref historique :
L’article L. 223-16 du Code du travail avant d’être abrogé par ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 stipulait que : « Des décrets déterminent les professions, industries et commerces, et en particulier ceux où les salariés ne sont pas habituellement occupés d’une façon continue chez un même employeur au cours de la période reconnue pour l’appréciation du droit au congé, où l’application des dispositions du présent chapitre comporte des modalités spéciales, sous forme notamment de la constitution de caisses de congé auxquelles doivent obligatoirement s’affilier les employeurs intéressés. (…) »
C’était en 1937, à une époque où les ouvriers du bâtiment avaient avec leurs divers employeurs des contrats de louage de service et pouvaient faire l’objet d’un licenciement pour fin de chantier. Aujourd’hui, la fonction de l’association loi 1901 dite : « Caisse de Congés Payés du Bâtiment de la Région de Toulouse, » ci-après dénommée « Caisse de Congés » semble bien éloignée de la lettre de la Loi.
Nous ne sommes plus en 1937, ni même en 1950, mais en 2009.
Mieux connaître votre caisse de congés :
Ce sont les élus de la CAPEB et de la FFB qui deviennent administrateurs membres de droits de cette organisation : la Caisse de Congés. Elle est présidée par Mme Elisabeth BEILLES, PDG de SOMEPOSE une entreprise de menuiserie bois PVC de 60 salariés. Elle est administrateur à la SMABTP, dans l’OPVCM « Objectif Euro Tréso Plus » (qui place l’argent des congés dans les paradis fiscaux) et de la SICAV « CPR Horizon 2010 ». Elle est aussi Présidente des menuisiers de la Haute Garonne.
Cette information est incomplète. La Caisse de Congés doit afficher obligatoirement la liste de ses administrateurs sur son site Internet. Ce sont les personnes, dont la fonction dans cette caisse est secrète. Ce sont celles que vous rencontrerez, si le hasard le permet, sur les chantiers. A moins qu’elles soient trop occupées en costume-cravate par ailleurs pour fréquenter ces lieux en bleu de travail.
Charge 1 : violation de l'article 11 alinéa 1 et 2 de la convention EDH.
L’article 11 dit que :
« § 1 Toute personne a droit à la liberté (…) d’association, (…)
§ 2 L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, (…) à la protection des droits et des libertés d’autrui. (…) »
En pratiquant l’affiliation obligatoire, sans préserver de droits garantis par la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, la Caisse de Congés ne respecte pas le droit d’association négatif. La Caisse de Congés méconnaît l’article 11 alinéa 1 et en particulier l’alinéa 2 de la Convention EDH. Voir Chassagnou et autres c/France CEDH 29 avril 1999, points 103 à 117. http://www.senat.fr/europe/chassagnou.html
L’article du code du travail D.3141-31 dit que « (…), en cas de défaillance de l’employeur dans le paiement des cotisations, elle (la Caisse de Congés) verse l’indemnité de congés payés à due proportion des périodes pour lesquelles les cotisations ont été payées, (…) ».
L’organisme qui assure les risques de non-paiement des créances des salariés est l’A.G.S. (l’Association pour la Garantie du paiement des créances des Salariés, branche de l’UNEDIC) auprès de laquelle Energies Diffusions cotise. Cette association protège les droits des salariés, pas la Caisse de Congés. Les salariés sont des créanciers privilégiés, ils peuvent faire appel à un syndicat, à l’Inspection du travail ou aux Prud’hommes comme ce fût le cas des salariés de la Caisse de Nantes. Celle-ci avait « oublié » de leur payer la RTT. Résultat : 200 000 euros à verser à ses salariés et 3 ans de bulletins de salaire à refaire. Les textes législatifs, réglementaires et conventionnels peuvent s’appliquer sans qu’une mouche survienne, pique l’un, pique l’autre, et pense à tout moment qu’elle fait aller la machine.
Charge 2 : violation de l'article 14 de la convention EDH
L’article 14 dit que :
« La jouissance des droits et libertés reconnues dans la présente Convention doit être assurée, sans discrimination aucune, fondée notamment sur (…) l’appartenance à une minorité, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »
Depuis 1937, la situation contractuelle des salariés a évolué dans les entreprises du BTP. Elle est désormais identique à celle des autres secteurs d’activité. Ces entreprises qui viennent bâtir à Pibrac ou à Aucamville n’embauchent pas sur place au début des travaux pour être licenciés en fin de chantier. Les salariés de ces entreprises se déplacent d’un chantier à l’autre. Ils sont en CDI. La variable d’ajustement en matière de ressources humaines passe par l’emploi des intérimaires qui n’ont pas de caisses de congés. L’automobile, l’industrie textile, la distribution, la métallurgie, la banque, l’assurance etc. ne sont pas soumises à l’autorité de telles organisations. Il y a donc discrimination en général.
Mais aussi, en particulier, vis à vis des professions ayant un rapport avec notre branche d’activité. Les élus de leurs organisations professionnelles ne siègent pas dans les caisses de congés. Ils sont en mesure de défendre ceux qu’ils représentent. Ici, élus et représentés se ressemblent. Ces O. P. ont obtenu la signature de Protocoles d’accord qui modifient cette disposition d’ordre public. Il a donc fallu que ces accords soient validés par le gouvernement. A cet effet, le 12 mai 2007 a été publié au J. O. un décret 2007-802 du 11 mai 2007.
Pour ces professions, du point de vue de l’Etat, il n’y a donc, semble-t-il, aucune nécessité à apporter des restrictions à leurs droits et libertés garantis par la Convention EDH !
Voir Chassagnou et autres c/France CEDH 29 avril 1999, chapitres II et IV.
Charge 3 : violation de l'article 1 du Protocole n° 1
L’article 1 du Protocole n° 1 dit que :
« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. »
La détention de l’argent social par la Caisse de Congés en moyenne plus d’un an à l’avance, sans cause d’utilité publique, n’apparaît pas compatible avec l’article 1 du Protocole n° 1 (protection de la propriété,) de la Convention EDH.
En effet, la collecte autoritaire par cette association de l’argent des congés s’effectue du 1er avril de l’année N au 31 mars de l’année N + 1 pendant la période d’acquisition des droits pour être redistribué à partir du 1er mai de l’année N + 1 jusqu’au 30 avril de l’année N + 2, période d’utilisation des droits à congé.
C’est la raison pour laquelle votre entreprise sera privée de sa trésorerie par le système de prélèvements financiers que la Caisse de Congés a mis en place en décrivant un mouvement perpétuel. L’usus et le fructus, deux des trois attributs du droit de propriété manqueront à Energies Diffusions. On peut alors se poser la question plus générale : cette organisation coûte-t-elle aux affiliés ? Il faudra bien démontrer qu’elle perd aussi une partie de l’abusus !
Voir Chassagnou et autres c/France CEDH 29 avril 1999, points 71 à 85.
Considération de cette disposition d'ordre public au regard de l’article 18 :
L’article 18 de la Convention EDH énonce que :
« Les restrictions qui, aux termes de la présente Convention, sont apportées auxdits droits et libertés ne peuvent être appliquées que dans le but pour lequel elles ont été prévues. »
Les décrets qui régissent la Caisse de Congés sont une disposition d’ordre public. Or Frédéric SUDRE, professeur à l’Université de Montpellier, expose dans son traité de droit international des Droits de l’Homme, (7ième édition refondue, page 213, point 151 - 2°,) : « afin d’empêcher l’utilisation abusive de la clause d’ordre public, l’article 18 (limitation de l’usage des restrictions aux droits) de la Convention EDH fait interdiction à l’Etat partie d’exercer sa faculté de restreindre l’exercice des droits garantis dans un but autre que celui pour lequel les restrictions ont été prévues, prohibant ainsi expressément le détournement de pouvoir. Goussinski c/Russie CEDH 19 mai 2004. »
Ingérence dans la vie privée des entreprises :
La question des interventions auprès des entreprises du BTP de la Caisse de Congés peut-elle être examinée sous l’angle de l’article 8 de la Convention EDH ? (Droit à la vie privée.)
En effet, dans quelle mesure cette association qui transgresserait la liberté d’association (droit négatif), le principe d’égalité, le droit au respect des biens, pourrait-elle exiger des informations qui concernent la vie privée d’une entreprise et en particulier par des interventions intra muros d’un contrôleur dit assermenté ? Est-ce également une nouvelle forme de discrimination qu’il convient de constater dans cette affaire ?
Il faut se référer à nouveau à un extrait de l’ouvrage précité sur les Droits de l’Homme du Professeur Frédéric SUDRE pages 406 et 407 :
« Les locaux professionnels sont également protégés par l’article 8 contre les perquisitions et visites domiciliaires (Chapell c/Royaume-Uni, 30 mars 1989, A. 152-A : perquisitions au domicile d’une personne physique qui est aussi le bureau d’une société contrôlée par elle ; Niemetz c/Allemagne, 16 déc. 1992, GACEDH, n° 40, préc. : perquisitions opérées au cabinet d’un avocat dans le cadre de poursuites pénales engagées contre un tiers ; Funke, 25 févr. 1993, A.256 A : visites domiciliaires des agents des douanes). L’arrêt Sociétés Colas Est et autres c/ France (16 avr. 2002) confirme expressément que l’article 8 est applicable au domicile des personnes morales. Se prévalant d’une « interprétation dynamique de la Convention », la Cour EDH affirme « qu’il est temps de reconnaître » le droit d’une société « au respect de son siège social, son agence ou ses locaux professionnels » (§ 41 ; RDP, 2003-3, obs. M Levinet : visites domiciliaires et saisies dans les locaux des sociétés requérantes).
Les articles 14 et 18 de la Convention EDH n’ayant pas une portée autonome, on peut dire, que d’éventuels requérants, après avoir épuisé les recours internes, pourront demander au Juge de Strasbourg d’examiner cette question et de dire s’il y a :
Violation de l’article 11 pris isolément,
Violation de l’article 11 combiné avec l’article 14,
Violation de l’article 11 combiné avec l’article 18,
Violation de l’article 1 du Protocole n° 1 pris isolément,
Violation de l’article 1 du Protocole n° 1 combiné avec l’article 14,
Violation de l’article 1 du Protocole n° 1 combiné avec l’article 18,
Violation de l’article 8 pris isolément,
Violation de l’article 8 combiné avec l’article 14,
Violation de l’article 8 combiné avec l’article 18.
Il faut préciser que le Juge de Strasbourg a associé à la liberté d’association et à la vie privée la notion « d’autonomie personnelle. »
Conséquences :
L’Article 3 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association stipule que :
« Toute association fondée sur une cause ou en vue d’un objet illicite, contraire aux lois, (…), est nulle et de nul effet. »
Que dit la loi relative au contrat d’association du 1er juillet 1901 à l’article 7 ci-dessous ?
« En cas de nullité prévue par l’article 3, la dissolution de l’association est prononcée par le tribunal de grande instance, soit à la requête de tout intéressé, soit à la diligence du ministère public. (…)
L’avis de la Doctrine :
A toutes fins utiles, nous vous informons que dans la revue de DROIT SOCIAL n° 11 - novembre 2006 a été publié un article intitulé : Le modèle syndical danois terrassé par le droit d’association négatif – A propos d’un arrêt de la Cour EDH (Grande Chambre) du 11 janvier 2006, (Sorensen et Rasmunssen c/Danemark) les professeurs Jean-Pierre MARGUENAUD et Jean MOULY, à la faculté de Droit et des Sciences économiques de Limoges, écrivent, nous citons :
« C’est ainsi que la chambre sociale de la Cour de cassation a eu à se prononcer par un arrêt du 22 février 2006 sur le point de savoir si l’adhésion aux caisses de congés payés imposée aux employeurs par l’article D. 732-3 du Code du travail (3141-12 du nouveau Code du travail) est conforme aux exigences de l’article 11. Par un attendu plus soucieux de sauvegarder le système français que de vérifier rigoureusement sa compatibilité avec les exigences européennes, la chambre sociale a estimé que la restriction à la liberté d’association des employeurs était justifiée, au regard de l’article 11-2 de la convention, par la nécessité de protéger les droits et la santé des salariés. On pourra regretter que la Cour de cassation ait un peu trop cavalièrement évité de répondre à l’invitation du pourvoi de vérifier s’il n’existait pas d’autres moyens d’assurer la protection des droits des salariés. » Fin de citation.
Cotisations « intempéries » :
Les intempéries font l’objet de ce qui est nommé correctement, une « cotisation » bien distincte du « prélèvement » de l’agent social des congés.
On peut dire, du point de vue de l’indemnisation du chômage des salariés pour intempéries, qu’il y a bien un but légitime poursuivi.
Mais est ce que l’ingérence qui conduit à la restriction de la liberté d’association est nécessaire, dans une société démocratique, à la protection des droits des salariés ?
Il n’y pas de caisses intempéries pour les ouvriers agricoles, les bûcherons, les Entrepreneurs de Travaux Forestiers, les entreprises du paysage, les marins pêcheurs. Il n’y a pas de caisses pour beau temps pour les salariés employés dans les stations de montagne. Faut-il en conclure que cette nécessité n’apparaît pas du tout comme une évidence ?
Cotisation « OPPBTP »
Pour ce qui concerne la cotisation OPPBTP, bien distincte de celle qui sert à financer l’indemnisation pour intempéries et du prélèvement de l’argent social pour congés, elle pourrait être prélevée directement par cet organisme d’hygiène et de sécurité qui est géré paritairement. La Caisse de Congés n’a qu’une fonction de « fermier général. » Ne serait-ce que pour « avoir l’air » nécessaire mais qui ne l’est pas du tout !
Juste traitement et proportionnalité entre l'ingérence et le but légitime poursuivi
Au point 112 de l’arrêt Chassagnou et autres c. France du 29 avril 1999 précité, on peut lire :
« La Cour rappelle que, pour évaluer la nécessité d’une mesure donnée, plusieurs principes doivent être observés. Le vocable « nécessaire » n’a pas la souplesse de termes tels qu’ « utile » ou « opportun ». En outre, pluralisme, tolérance, et esprit d’ouverture caractérisent une « société démocratique » : bien qu’il faille parfois subordonner les intérêts d’individus à ceux d’un groupe, la démocratie ne se ramène pas à la suprématie constante de l’opinion d’une majorité mais commande un équilibre qui assure aux minorités un juste traitement et qui évite tout abus d’une position dominante. Enfin, une restriction à un droit que consacre la Convention doit être proportionnée au but légitime poursuivi (arrêt Young, James et Wester c. Royaume-Uni du 13 août 1981, série A n° 44, p. 25 § 63.) »
La Convention EDH prime sur le droit interne :
Faut-il attendre que la France soit condamnée comme elle l’a été dans le cadre de la loi Verdeille ? Pourtant, dans cette affaire devenue Chassagnou et Autres c/ France, les juges internes avaient tranché sans ambiguïté. On pouvait parler de jurisprudence constante. Seul, le TGI de Périgueux a démontré que le premier juge, comme doit l’être un juge quel que soit le degré de juridiction, est bien le juge naturel des Droits de l’Homme, (point 20,) sachant que la Convention EDH est un instrument constitutionnel de l’ordre public européen. Cette loi suprême, faut-il le rappeler, s’applique avant la loi interne. L’article 55 de la Constitution dit clairement que : « Les traités ou accords (internationaux) régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, (…)
Le Juge interne est le juge naturel des droits de l’homme :
La norme conventionnelle est incorporée dans l’ordre juridique interne.
Le professeur Frédéric Sudre, dans son ouvrage Droit européen et international des droits de l’homme 9ième édition revue et augmentée, PUF, points 136 à 141, (pages 194 à 204) écrit :
« (…) Distinct (…) du contrôle de constitutionnalité de la loi, qui est réservé au Conseil constitutionnel, le contrôle de conventionnalité de la loi incombe dès lors aux juridictions ordinaires, chargées de mettre en œuvre les exigences de l’article 55 de la Constitution en faisant prévaloir, s’il y a lieu, le traité international sur la loi nationale contraire. La primauté de la règle conventionnelle sur la loi est désormais admise sans discussion, que la loi nationale soit antérieure ou postérieure au traité. (…) »
« (…) Il n’en reste pas moins que le contrôle de conventionnalité de la loi concourt à un contournement du contrôle de constitutionnalité et tend à transformer les juges ordinaires en juges « du second degré de la constitutionnalité des dispositions législatives » (N. Molfessis, chron. RTD civ., 1999, 241). Il en est particulièrement ainsi lorsque le juge ordinaire écarte l’application d’une loi, jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, au motif de son « inconventionnalité » (en pratique, de sa contrariété à la CEDH). »
« (…) Le juge interne est en effet le juge de droit commun de la convention internationale d’effet direct : c’est à lui, au premier chef, qu’il appartient d’assurer la sanction du droit garanti par cette convention, tout particulièrement la Convention européenne des droits de l’homme. La Convention a un champ d’application matériel tel qu’elle a un rayonnement global dans l’ordre interne, déployant son influence sur l’ensemble des branches du droit et ignorant le partage des compétences entre les juridictions. Tout juge interne, le juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle selon l’article 66 de la Constitution, comme le juge administratif, défenseur traditionnel des libertés publiques, a alors vocation à faire application de la Convention dans l’ordre juridique national. (…) »
« (…) Le juge national voit ainsi son office élargi, puisqu’il est le gardien des libertés individuelles reconnues au plan européen. D’une manière générale, il lui appartient d’interpréter et d’appliquer le droit interne à la lumière de la Convention. Par le jeu de la primauté-subsidiarité, le juge national est ainsi conduit à « enrichir » le droit interne, en en dégageant des potentialités nouvelles que la CEDH incite à révéler, à « compléter » la loi nationale, faisant appel à la Convention pour combler une lacune ou pallier une insuffisance de celle-ci, et, enfin, s’il y a lieu, à « écarter » la loi nationale, lorsque celle-ci n’est pas compatible avec les exigences de la Convention. Le contrôle de conventionnalité, comme le montre bien son usage en matière de validations législatives, vient modifier l’agencement des sources du droit entre elles, autorisant une norme infraconstitutionnelle – la CEDH – à paralyser l’application de la loi, alors même que celle-ci a pu être jugée conforme à la Constitution, et érigeant le juge en censeur de la loi. »
« (…) rien n’interdit au juge national de faire application de la Convention aux contentieux interindividuels. La question de l’« effet horizontal » de la Convention se confond ici avec celle de l’applicabilité directe en droit interne de la norme conventionnelle et de son application par les tribunaux internes à des litiges privés. Comme le note justement le Pr. Coussirat-Coustère, « la Convention fait partie de la légalité que le juge doit respecter et, par conséquent, l’effet direct des droits garantis est autant vertical (contentieux de droit public) qu’horizontal (contentieux de droit privé). » (…) »
Conclusions
Il incombe donc à la Caisse de Congés de ne plus persécuter votre entreprise et de cesser de vous harceler. A moins qu’elle soit en mesure de développer des arguments qui viennent anéantir tout ce qui précède.
Votre entreprise serait-elle dans l’illégalité parce qu’elle refuse d’abandonner l’argent social des congés pour le remettre entre les mains de nos collègues qui siègent à la caisse de Toulouse ? Sont-ils insuffisamment occupés dans leur entreprise pour lui consacrer du temps. Les plombiers qui sont confortablement installés dans son conseil d’administration ont-ils un bon tuyau pour siphonner la trésorerie de leurs collègues ? Y trouvera-t-on également quelques menuisiers pour la raboter ?
Ne seraient-ce pas plutôt les décrets D.3141-12 à 37 du Code du travail qui sont hors la loi ou pour utiliser un euphémisme rhétoricien, nous dirons qu’ils sont inconventionnels ?
Si votre entreprise se comporte illégalement vis à vis de la Caisse de Congés, il va falloir que la Caisse de Congés vous démontre que les restrictions à vos doits et libertés garantis par la Convention EDH constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, (c’est-à-dire ouverte, tolérante, pluraliste), à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.
Il faut savoir que la Caisse de Congés prête son concours aux pouvoirs publics et aux organisations professionnelles du bâtiment (article 2, § 4 et 5 de ses statuts.)
Par ailleurs, nous avons observé que la Caisse de Congés ne sollicite jamais les médias. Ce qui la caractérise, dans ce domaine, c’est la plus grande discrétion !
Mais vous n’avez aucune chance d’obtenir satisfaction auprès de la Caisse. Vous allez être contraint de saisir la Justice.
Vu la Constitution en son article 55
Vu l’article 61-1 qui permettra de saisir le Conseil Constitutionnel pour inconstitutionnalité de la loi, lorsque la loi organique sera adoptée,
Vu la loi relative au Contrat d’association du 1er juillet 1901, en ses articles 1, 3, 7,
Vu l’article 1 de la Convention européenne de Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,
Vu les articles 8, 11, 14, 18, 1 du Protocole additionnel n° 1 de la Convention européenne,
Vu l’article 35 § 1 de la même Convention qui, en principe, confère à une requête son caractère de recevabilité qu’après épuisement des voies de recours internes,
Vu les principes généraux du droit français qui présuppose l’existence de l’autonomie de la volonté chez un co-contractant ;
nous vous invitons, si notre plaidoyer vous convient et si vous le souhaitez, compte tenu du montant qui vous est réclamé par la Caisse de Congés, de saisir le Tribunal d’Instance appelé Juge de proximité afin de lui demander de dire que les décrets D.3141-12 à 37 renferment une obligation d’adhésion à la Caisse de Congés qui est inconventionnelle et que par conséquent le texte qui l’impose ne s’applique pas. La défense de vos intérêts, qui sont aussi les nôtres, devra être assurée par un conseil spécialisé dans le doit international privé et avoir une bonne connaissance du rôle et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
Nous restons, bien entendu, à votre disposition.
Soyez assuré, Cher Collègue, de nos sentiments cordiaux et dévoués.
Vos collègues,
Patrick COUTURAS, Gérant et François MAILLOT, Associé